L’histoire de Vézelise

Initialement, les comtes de Saintois avaient eu pour résidence le château de Velaine, bâti sur le plateau de Viller, à l’Orient de Vézelise. Les cités de Velaine et Vexillum (Vézelise) semblent avoir cohabitées durant plusieurs siècles.

Des fouilles datant de XIXème siècle, ont mis à jour en différents endroits alentours de Vézelise des tombeaux, des armes, des monnaies et des poteries remontant à la période gallo-romaine. L’un de ces tombeaux, formé de grandes pierres plates, telles que le sol les fournit, renfermait le squelette d’un homme ayant les pieds tournés vers l’Est. A côté de lui se trouvait une épée en fer, à hauteur de ceinture, une sorte d’anneau en cuivre traversé par une longue cheville de fer et deux lames de poignard à double tranchant, à hau­teur de tête, un fer de lance et à d’autres endroits, une fibule en métal blanchâtre, une pièce de bronze de la grosseur d’un sou, un vase de poterie rouge, une coupe ou tasse en terre grise, enfin une bague de cuivre. Dans la bouche du squelette, il y avait une monnaie de Crispus.

Photo aérienne d'une ville gallo-romaine entre Hammeville et Vézelise

De nouvelles fouilles réalisées sur ce plateau de Viller permirent de découvrir un assez grand nombre de sépultures. Les restes de corps étaient placés côte à côte sur la roche, en ligne ; un certain nombre étaient séparés par de grandes pierres brutes, avec, près de chacun d’eux, tantôt une épée, tantôt une lance, quelquefois l’une et l’autre, ainsi que des boucles de cuivre, des fragments de colliers.

C’est sur ce plateau que se trouvait primitivement bâti Velaine. Des nombreux vestiges de la période gallo-romaine et du moyen âge ont été découverts sur une étendue de plus de 1.5km de long comme de large. Des inégalités résultant çà et là de masures et de décombres, des pierriers, des fondations et de nombreux débris antiques, des médailles, des monnaies, des armes, etc… etc., font présumer que ce territoire a été autrefois couvert d’habitations sur l’âge desquelles ils se faisaient médailles et des monnaies romaines, et des fragments de meules portatives, de carreaux de briques et surtout de ces tuiles dont les Romains ont, les premiers, introduit l’usage dans les Gaules. On peut inférer qu’il existait là, autrefois, une agglomération de quelque importance, car plusieurs tronçons de voies supposées romaines, pavées en pierre debout, venant de Vandeléville, de Clerey, de Tantonville, semblent converger vers ce point.

Situation des lieux archéologiques autour de Vézelise

Les recherches historiques ont amené à penser qu’il existait, sur le plateau de Viller, à l’Est de Vézelise, un château et une ville du nom de Velaine. Les ruines du moyen âge, qu’on peut remarquer en cet endroit, mêlées aux débris gallo-romains, seraient celles de cette antique localité. La voie qui, de Vézelise, conduit sur ce plateau, s’appelle Chemin-de-Velaine, tandis que cet endroit à traditionnellement gardé la dénomination de Ban-de-Velaine.

Ce château fut la résidence des comtes du Saintois. Ainsi pouvait-on lire sur un titre datant du 13 novembre 998, reproduit sur un vidimus (copie certifiée) de 1315 :

« Nous, Richard du Saintois, seigneur de ce lieu, confessons et reconnaissons librement tenir et posséder en fief et hommage de l’Empereur Henry, mon souverain seigneur, à cause de son dit Empire, les dits fiefs consistant en : Le château de Velaine et ses dépendances, terres, champs et pré…etc., etc…, en hauteur seigneurie, juridiction en hommes, femmes, maisons, etc., etc… Fait au dit château de Velaine le treize du calendrier de novembre l’an du seigneur 998. »

Plusieurs autres documents établissent d’une manière incontestable l’existence de cette localité de Velaine, entr’autres des actes de cessions et de donnations faites à l’Abbaye de Saint-Léon de Toul en 1105, en 1220, en 1249, lui attribuant une part de ce que les donateurs possédaient dans la ville de Velaine.

Une charte de Henri, comte de Vaudémont, datée du mois d’octobre 1291, ne laisse aucun doute sur la situation de la localité mentionnée dans les titres. Elle commence ainsi :

« Je, Henris, cuens de Wademont, fais cognaissant à tous que com descors fuit entre Seigneur Henris de Hans, mon fiable, d’une part, et les religieux hommes l’Abbé et lou couvent de Sainct Leu de Toul, d’aultre, si com de faire et de mestre maiour et juistice en la ville de Veleinnei desoubz Wadérnont, en laquelle lidis Henris et sui hoir ne doyent paure fors que la moitié des amendes, etc., etc… »

La localité est mentionnée dans des titres jusqu’à la fin du XVe siècle, et parait avoir été complètement détruite par un incendie, en 1489à la suite duquel elle ne s’est probablement pas relevée de ses ruines.

Ainsi est-il prouvé que les villes de Velaine et Vézelise existèrent à distance et conjointement, pendant plusieurs siècles, puisque Vézelise, sous le nom de Vexillum, est déjà mentionné dans des diplômes de 965, tandis que Velaine est encore cité en 1291, et même en 1397.

Sources

Histoire méconnue du canton de Vézelise de Bernard PERRIN

BULLETINS PAROISSIAUX entre décembre 1907 et octobre 1910 de P. MANSUY, Curé de Vézelise

Le site internet Patrimoine de France

Une guerre de succession, fratricide, opposa Charles II, duc de Lorraine, à son neveu, le Comte de Vaudémont, engendrant un siège, puis un blocus sur la ville de Vézelise.

Novembre 1425 – Réunie à Nancy par convocation du duc de Lorraine, Charles II, la noblesse lorraine jura de reconnaître Isabelle, fille de Charles, pour dame et duchesse après la mort de son père. Isabelle était l’épouse de René d’Anjou, qui, à la mort de son beau-père, deviendrait duc de Lorraine.

Isabelle de Lorraine, duchesse
Isabelle de Lorraine, déchesse, née en 1410, morte en 1458

Antoine de Vaudémont, fils de Ferry et neveu de Charles II, ne l’entendit pas ainsi. Etant le plus proche héritier mâle du duc, il prétendit avoir droit à sa succession sur le trône de Lorraine. En mai 1425, le duc Charles écrivit à son neveu de Vaudémont pour la troisième fois, lui demandant de ne pas revendiquer à sa mort la succession du duché de Lorraine et de s’engager sur cette question par lettres dûment signées et scellées.

La missive ducale resta sans réponse, sonnant le début des hostilités. Le Duc paya une petite armée, sous le commandement de Jean de Remicourt, dit Pélégrin, qu’il envoya début juin assiéger la capitale du comté, Vézelise. La lutte était inégale. Le siège ne pouvait durer longtemps, car la ville n’était défendue que par 800 hommes tandis que l’armée de Jean de Remicourt comptait 2300 hommes. Cependant, cette garnison, aidée par la population, opposa aux Lorrains une vigoureuse résistance.

Antoine de Vaudémont
Antoine de Vaudémont, 1400-1458

Le 20 juin, le sénéchal de Lorraine, Jean de Remicourt, fit mortellement blessé par une flèche. Les Lorraines réalisèrent très vite qu’il leur serait impossible de donner l’assaut au château. La ville était encaissée et les tours qui constituaient la défense de la ville, permettaient une surveillance continue des hauteurs voisines. La seule solution restait de convertir le siège en blocus.

En 1428, des 800 soldats en garnison, il n’en restait plus que 70. La famine et ses terribles conséquences contraignirent le gouverneur à se rendre.

Sources

Histoire méconnue du canton de Vézelise de Bernard PERRIN

C’est à travers les registres de comptabilité du receveur du Comté de Vaudémont aux Archives de Meurthe et Moselle qu’on découvre un aperçu de la vie au château de Vézelise aux XVème siècle, alors que Dame Yolande d’Anjou, une des plus illustres princesses de notre histoire locale, nièce du roi Charles VII, cousine germaine de Louis XI et soeur de Marguerite d’Anjou, reine d’Angleterre, s’occupait de gérer les lieux.

Représentation de Yolande d'Anjou d'après un vitrail du xve siècle, aujourd'hui disparu, qui se trouvait dans l'église des Cordeliers d'Angers.
Représentation de Yolande d'Anjou d'après un vitrail du xve siècle, aujourd'hui disparu, qui se trouvait dans l'église des Cordeliers d'Angers.

Ces registres, jusqu’en 1473,sont intitulés : ” Compte de la recepte de deniers, cires et poulailles, revenus du comté de Vaudémont appartenant à Très Haute et Excellente Dame et Princesse, notre très redoutée Dame Yolant d’Anjou, comtesse de Vaudémont et Harecourt”. La partie consacrée aux dépenses montre Yolande résider presque sans interruption à VEZELISE, notamment au cours des années 1471, 1472 et 1473, se chargeant personnellement de l’administration avec un soin et un dynamisme particulier.
Tous les mandements sont signés de sa main et elle ne laisse que très rarement le soin au bailli ou au maître d’hôtel d’ordonner les dépenses. La comtesse à l’oeil sur tout, depuis les gros travaux jusqu’aux plus menus détails domestiques, ainsi sur :

– les travaux au château et aux fortifications de Vézelise

Les plus considérables sont des travaux de charpente et de couverture; par exemple : Fin 1471, on recouvre la tour sur la porte de Brénon et la loge de la poterne, puis “la chambre dessus la porte du chastel et le toit de devant la chapelle’; enfin ” les toits du chastel depuis la grosse tour jusqu’au four!’ En décembre 1471, un charpentier construit “le tabernacle sur la porte du chastel de Vézelise pour pendre la cloche” et refait la galerie qui joint la tour ronde à la chambre de la comtesser. Au printemps 1472, de grands travaux de maçonnerie sont entrepris :
En mars, on fait un pan de mur sur les fossés du château et deux angles de pierre de taille aux alentours du meix (jardin) au bout du pont, ainsi que deux piliers devant le pont du château. Puis vient la réfection des murs des fossés. En juin, 126 toises de murailles sont maçonnées. Dès le mois d’avril, on avait dû construire un pont entre le château et le meix ainsi qu’un deuxième pont”au travers d’Euvry pour charroyer la chaulx et les moellons destinés à ce travail.
Enfin, 32 toises 1/2 de murailles de la ville sont faites “dessous le beffroy Chaemel”.

Par ailleurs, en novembre 1471 est payée la façon d’une roue neuve au moulin de Vézelise.

Les entrepreneurs et ouvriers, trouvés sur place, sont dirigés par Henri Parisot, maître des oeuvres. Seul le verrier Estienne, à qui l’on fait appel “pour de menus ouvrages de son mestier” vient de Neufchâteau.

– l’entretien de l’armement du château

En février 1472, Didier l’orfèvre de Vézelise, qui est aussi fondeur, “met à point les bastons à pouldre” (petits canons) et Colin, charpentier au même lieu “fait six tutels pour mettre les harnois d’arme” (supports pour les armures).

– l’aménagement de la cuisine

Ledit Colin y fait un dressoir et un râtelier pour pendre les pots quant à Didier l’orfèvre, il est chargé de l’entretien de la vaisselle de métal mais on fait appel parfois à un orfèvre de Nancy, peut-être plus habile, pour les pièces les plus pré-cieuses.

– l’entretien des chevaux

En octobre 1471, cinq mille bottes de foin sont fournies pour l’écurie de Madame. Chaque mois,de 18 à 20 fers sont remplacés aux chevaux par le maréchal Guillart Wirion de Vézelise. En outre,la comtesse achète en novembre 1471, à son maître d’hôtel, un cheval grison pour la somme considérable de 40 florins d’or. Puis en mai 1473, à Ferry de Lignéville, seigneur de Tanton-ville, une haquenée pour 6 florins.

– l’entretien du jardin

Le 16 mai 1471, le jardin du château de Vézelise était bêché puisque Yolande fait règler son salaire à Didier Gérard, ma-noeuvre, qui vient d’exécuter le travail.

– les exécutions criminelles

Le 5 septembre 1472, Madame mande au receveur de payer au prévôt Jean Françoy, 8 francs 5 gros 12 deniers pour ” les dépens du mytre de Nancy ( le bourreau) qui a esté par deux fois faire exécution de justice en cette ville de Vézelise, assavoir de coppé l’oreille du Liegeois et pandre Alexandre aux fourches (le gibet)”

– l’Hôtel de Madame

Outre le fidèle chambellan, Monsieur de Tantonville, qui a une position un peu exceptionnelle de conseiller et d’homme de confiance et à qui Yolande confie des missions personnelles, la charge principale est celle de Maître d’Hôtel, occupée alors par Tassin la Fontaine. Il est responsable de tout le personnel domestique du château. Puis vient le Clerc de Cuisine, Nicolas Genest; le boulanger;
Michel, le boucher; Escarlette, l’echansonnier etc…
Cependant, c’est toujours Yolande qui règle personnellement les questions d’approvisionnement. Les diverses denrées sont le plus souvent fournies par les marchands de Vézelise ou achetées aux quatre foires qui se tiennent annuellement dans la ville, mais il arrivait que l’on se rendit à Toul, Metz et même jusqu’à Lyon ou Troyes pour se procurer des produits que l’on ne trouvait pas sur le marché local mais qui ne sont hélas pas toujours précisés.

– ainsi pour les fourrures : à l’approche de l’hiver 1471, Pierre Barbier se rend à Toul chez Arnould le Mitre pour acheter 20 francs de pelleterie.

– et pour certains tissus de luxe, telles ces 12 aunes de toile de Flandres achetées à Metz pour Madame en octobre 1471.

Plan du château au XIVème siècle
Plan du château au XIVème siècle

Les achats de tissus ordinaires comme ces 21 aunes de grosse toile, en 1471 ou ces 65 aunes de toile, 13 aunes de drap gris et 7 aunes de drap noir , en 1472 (nous sommes toujours en deuil du comte Ferry) sont effectués à Vézelise.
Quant à ce messager envoyé à Lyon pour en ramener plusieurs denrées pour Madame, on ne sait ce qu’il a bien pu rapporter de son voyage.
Les provisions de bouche sont aussi fournies par le commerce local: Les caques de harengs pour le Carême, chez Estienne le boucher; le lard et des moutons, chez Jehan Wirion; des gras porcs, chez Jehan Guiot; boeufs et moutons, chez Mougin Lambert, boucher, tous de Vézelise. On va chercher le sel à la saline de Moyenvic. Le poisson est fourni par les étangs du comté. En mars 1472, un filet à pêcher est acquis de Jean Bourguignon, pêcheur. Point n’est besoin d’acheter les volailles, il en provient suffisamment de la recette du domaine.
À titre indicatif, il est intéressant de noter que du ler octobre 1471 au 30 septembre 1472, ont été livrés au clerc de cuisine”pour la provision de Madame en son chastel de Vézelise” : 8 boeufs dont 4 gras, 2 veaux, 139 moutons, 152 livres de lard, 3 caques de harengs, alors que plus de 102 muids de vin (tant ” vieil verjus que nouveau verjus”) achetés par Escarlette l’échansonnier, remplissaient les caves. Cependant que 1447 gelines passaient par la “chambre aux gelines”, le poulailler du château.

Photomontage du pont du Brénon au XIVème siècle
Photomontage du pont du Brénon au XIVème siècle

Distractions et réceptions

Au Moyen Age, dans la région, rares sont les représentations théâtrales dont le souvenir nous a été conservé. Aussi il est remarquable d’en trouver une, citée à Vézelise en 1471. Il s’agissait d’un mystère joué peut-être à l’occasion de la fête patronale car, le 10 octobre, Madame mande au receveur “de bailler et délivrer 2 florins à ceux qui ont fait le jeu de la vie Saint Cosme et Saint Damien”. Au début du XVe siècle déjà, une pièce à thème religieux avait été donnée à Vézelise, le 22 mai 1410, fête du Saint-Sacrement, où l’on fit “le jeu Madame Sainte Agnès” et qui attira la noblesse des environs. C’est peut-être la plus ancienne mention de représentation de mystère connue en Lorraine.
Le même mois, Monsieur de Calabre, Nicolas duc de Lorraine, fils du duc Jean et neveu de Yolande,est de passage à Vézelise où il arrive le 20 oc-tobre. Serait-ce à son retour de Paris qu’il avait dû fuir précipitamment en raison de sa brouille avec le roi Louis XI ? À cette occasion, 31 livres de cire sont délivrées au maître d’hôtel pour l’illumination du château. La veille, les maires de Forcelles sous Gugney, Vitrey, Houdreville, Thelod et Battigny étaient venus apporter “en la cuisine de Madame”, 304 gelines et 37 chapons qui durent servir à confectionner un repas pantagruelique.

Sources

Histoire méconnue du canton de Vézelise de Bernard PERRIN

Un document de la fin du XVème siècle révèle que le premier  hôpital de Vézelise, appelé Hôtel-Dieu, fut fondé au XIVème siècle par Marguerite de Luxembourg, épouse de Henri V, comte de Vaudémont.

Enluminure extraite du Livre de vie active de l’Hôtel-Dieu de Paris de Jehan Henry, vers 1482-1483
Enluminure extraite du Livre de vie active de l’Hôtel-Dieu de Paris de Jehan Henry, vers 1482-1483

Selon une étude de Lucien Husson et Lucien Charles, “ce premier hôpital était situé tout près de l’église, face au grand portail”. Les locaux n’étaient certainement pas vastes; un inventaire dressé en 1600 fait état d’un matériel restreint: “8 luts de plume, 6 couvertures, 12 draps, 3 pots, 2 chandeliers, 2 chaudrons de cuivre, 2 pots de fer, 2 coffres, 7 châlits en sapin…”.

En 1626, Didier Virion fit don à la ville et à l’hôpital d’une somme de 6500 F, avec cette mention: “Il sera permis que les rentes provenant de sa donation, les quatre premières années, soient employées à la construction d’un hôpital plus spacieux.”

Le conseil de ville achète alors un terrain près de la porte Notre-Dame et c’est ainsi que fut construit, adossée aux murailles de la ville, la partie la plus ancienne de la maison qui a conservé cette fonction jusqu’à il y a encore quelques années.

C’est un architecte de Nancy, Jean Lahier qui conçu ce premier bâtiment. Le rez-de-chaussée était occupé par un dortoir de 24 lits, qui donnait à une extrémité sur le jardin, alors que l’autre côté était prolongé par une petite chapelle. La sacristie de cette chapelle occupait la place donnant sur la cour intérieure et de l’autre côté se trouvaient les cuisines et la chambre de l’économe.

L’ensemble formait une quadrilatère qui allait de la chapelle au jardin, pour revenir à l’angle de la rue des Maix. Rapidement, les travaux se poursuivirent. En 1673, on construisit un nouveau corps de bâtiment qui prenait à l’angle de la rue des Maix et en 1682, on agrandit la chapelle, tout en élevant des murs, pour délimiter la propriété.

En 1818, la ville de Vézelise décida de démolir la porte Notre-Dame, trop étroite, la circulation devenant de plus en plus difficile. Cette même année, l’hôpital entreprit de construire le bâtiment qui donne aujourd’hui sur la rue, mais il fut difficile d’équilibrer dépenses et recettes. En effet, avant la Révolution, l’hôpital disposait de rentes importantes. Il y avait d’abord le revenu des terres situées à Vézelise, Laloeuf et Chaouilley. Il y avait aussi les dons et legs de certains pensionnaires, les amendes infligées pour les délits et enfin, les quêtes de la paroisse.

Ces revenus avaient été spoliés en partie à la Révolution. L’hôpital avait été compensé pour ces pertes par une somme en or de 2900 F, mais cela ne suffisait pas pour régler la construction de ce nouveau bâtiment. Les administrateurs firent alors appel à la générosité du duc et de la duchesse d’Angoulême, en visite à Nancy ; une somme de 3000 F leur fut accordée par le Ministère de l’Intérieur, en octobre 1819.

Enfin, le hasard joua en faveur des administrateurs, qui n’avaient pas, malgré tout, bouclé leur budget. Ils découvrirent dans les archives de l’hospice, la preuve d’un prêt de 6000 livres, accordé par l’hôpital à la ville de Vézelise, le 11 décembre 1789. Cette somme fut remboursée avec l’autorisation du préfet de la Meurthe. En ajoutant à l’ensemble de ces sommes, quelques dons reçus par ailleurs, les travaux furent exécutés totalement.
Vers les années 1980, d’importantes transformations furent entreprises, puis vint le déménagement dans les nouveaux locaux, sur les hauteurs de Vézelise où se poursuit la mission débutée il y a plus de six cents ans.

Sources

Histoire Méconnue du Canton de Vézelise, de Bernard PERRIN

En février 1599, le duc Charles III décide la construction des halles et de l’auditoire.

Une structure imposante

Il confit la tâche à Nicolas La Hire, maître et conducteur des bâtiments de son Altesse, dont la première œuvre, l’hôtel de Lillebonne à Nancy, est encore visible actuellement.

Cependant, Nicolas La Hire laissa le soin de dresser le plan de la halle proprement dite, entièrement construite en bois, à un spécialiste, Maître Claudin Philippe, charpentier de Vézelise. Dans les archives départementales sont retrouvés par Jean-Pierre André deux documents important ; le 1er concerne le  coût des travaux ainsi qu’une présentation du projet, tandis que le 2nd, les matériaux nécessaires aux travaux.

Ainsi les dimensions du projet pour l’ensemble du bâtiment (halle + auditoire) sont indiqués comme tel: 150 pieds (42m) de longueur sur 46 pieds (13m) de largeur. C’est l’exact surface occupée de nos jours par les halles de bois (jusqu’à l’escalier de l’hôtel de ville) et l’auditoire (ancienne Justice de Paix).

L’auditoire sera bâti en maçonnerie et pierre de taille. Le rez-de-chaussée s’ouvrira sur l’extérieur par quatre entrée en arcades. À l’intérieur se tiendront 16 boutiques “pour bouchiers et autres marchands”. Les dites boutiques s’ouvriront par une arcade, seront surmontées d’un plancher et “d’une toiture basse couverte de tuiles”.

L’emplacement resté libre au centre de ce rez-de-chaussée “servira pour y peser et décharger toutes marchandises sujettes au poids”. 

L’étage sera réservé à accueillir l’auditoire proprement dit, avec une grande salle pour les audiences et une petite chambre annexe. La grande salle sera éclairée par quatre fenêtres, la petite par trois. Au-dessus, “il sera aussi un grenier pour y retirer les grains de vente ou pour telle autre commodité auquel il y aura une porte et sept petites fenêtre de 3 pieds de haut et 1 pied 3/4 de large, le tout en pierre de taille”. L’ensemble de l’édifice, du sol jusqu’à l’amorce de la toiture mesurera 35 pieds (9.80m) de hauteur.

Cependant, le centre de Vézelise, en cette fin du XVIème siècle, n’avait pas la même configuration que de nos jours. Cinq maisons se dressaient à l’emplacement de l’auditoire, forts anciennes pour au moins quatre d’entre elles. Le duc décida de les faire exproprier. Les matériaux récupérés de leur démolition et des anciennes Halles furent vendues aux enchères.

les Halles de Vézelise au début du XXème siècle
les Halles de Vézelise au début du XXème siècle

8000 clous doubles, 8000 clous simples

L’impressionnante liste des matériaux pour la construction de la charpente est la suivante:

“21 pièces de bois de chêne de 30 pieds de haut, 1 pied 1/2 au carré” pour les eustaches (piliers).

12 pieds de chêne de 30 à 40 pieds de long (une dizaine de mètre chacun) pour les 40 arbaletriers.

6 pièces de chêne de même longueur, pour servir à faire les montants faisant séparation des fenestres de la halle, au-dessus pour éclairer les greniers. 

Enfin 13 pièces de chêne, toujours de 30 à 40 pieds, tant pour supporter lesdits montants que pour les traverses du plancher.”

Si tout ce bois pouvait être coupé dans les forêts du comté de Vaudémont,  d’autres pièces devaient être acheté et importé de Bayon:

“3 voiles de planches pour lattes et planchers, 

37 sommiers de sapin, 100 traveteaux de sapin de 14m de long”

De même était prévu de faire venir de Nancy et Saint-Nicolas-de-Port “150 chevrons de sapins de 40 pieds et 200 planches de chênes pour fermer les accoustoires de la halle en haut”

La mise en place de cette énorme structure nécessita “4 cents de broches de fer, grandes et moyennes, 8000 clous doubles et 8000 clous simples, plus de 450 livres de barreaux qui furent posés à 3 des croisées éclairant la grande salle de l’auditoire.”

Il y eut sans aucun doute des difficultés financières, car trois ans plus tard, le duc donnait à deux bourgeois de la ville, Gérard Gravelle et Claudin Barbanson, venus le solliciter au nom des habitants, la somme de 400 F “pour employer au bâtiment et érection de la galle nouvellement érigée à Vézelise et signamment au parachèvement de l’auditoire”.

Escaliers sous les Halles de Vézelise
Escaliers sous les Halles de Vézelise

Sources

Histoire méconnue du canton de Vézelise de Bernard PERRIN

Au cimetière de la ville, dans la première allée transversale, presque en face de la chapelle Contal, on lit sur une tombe, l’inscription suivante « Ici repose Marg. Falque, épouse Thirion, décédée le 21 juillet 1841, victime du désastre d’Etreval. »

Château d'Etreval
Château d'Etreval

Lorsque le Chanoine MARTIN interrogea, en 1939, les plus de soixante-dix ans de la paroisse à ce sujet, les renseignements obtenus furent plutôt maigres et vagues. Il eut même un échantillon de la rare puissance qu’à la tradition orale de grossir, avec le recul du temps, les moindres faits :

« Ah ! oui. La catastrophe d’Etreval ! Il y a eu une centaine de victimes !.. Le sang coulait du château dans l’Uvry.

— Pardon ! Vous voulez dire le Brénon.

— Rien que ça ! »

Pour en avoir le cœur net, il fit consulter les journaux régionaux de l’époque, le Journal de la Meurthe et l’Espérance, et apprit ce qu’il voulait savoir.

C’était le 21 juillet 1841, on procédait à la vente mobilière du sieur Charles-François-Marie de Thomassin, décédé au château d’Etreval, le 13 juin précédent. (Par sa mère, il était le petit-fils de Dominique de Tervenus, propriétaire du château avant la Révolution.)

Le notaire Jacquot, de Vézelise, effectuait la vente, à la demande des sept héritiers, parents éloignés du défunt. Le château et le domaine ne furent mis en vente que le 9 décembre suivant.

Château d'Etreval
Château d'Etreval

La curiosité, comme d’ordinaire en pareille occasion, avait attiré pas mal de monde du voisinage. « La foule était immense, chacune des chambres du vieux manoir était encombrée d’amateurs et de visiteurs ». Or, au moment où l’on allait passer à la vente des meubles d’une chambre du premier étage, et quand déjà, sur les pas de l’officier ministériel, plus d’une centaine de personnes s’étaient engouffrées dans la pièce, « une poutre qui soutenait, par le milieu, le plancher, se brisa tout à coup sous la charge, et ensevelit dans les décombres la foule entassée immédiatement au-dessous… Le plancher crevé forma une espèce d’entonnoir dans lequel étaient pêle-mêle plus de cent cinquante personnes, marchant les unes sur les autres. Un lit, une commode et son marbre, avaient suivi la foule sur ce plan incliné, et sans la présence d’esprit d’un homme de Goviller, un secrétaire aurait eu le même sort, si, placé sur le seuil de la porte, il ne l’avait retenu d’un bras vigoureux, évitant ainsi un nouveau malheur. »

Ce fut un horrible spectacle. Des cris de douleur s’élèvèrent de toutes parts. Au dehors, les gens, glacés d’épouvante, n’osèrent, sur le moment, pénétrer dans la maison.

La nouvelle de la catastrophe fut vite connue de Vézelise. C’est un propriétaire d’Omelmont, un sieur Florentin, qui vint l’annoncer, « le visage en feu, les traits renversés, et dans une exaltation impossible à décrire ».

On devine la consternation et l’angoisse de la ville, et de ceux surtout qui savaient l’un ou l’autre des leurs à la vente d’Etreval. On devine leur hâte, leur course éperdue à travers champs, vers le château fatal. C’est à qui arriverait des premiers.

« Quand, dans mon enfance, les vieux nous racontaient l’accident, ils ne tarissaient pas sur l’indescriptible panique qui s’était emparée de tout Vézelise. Ils ajoutaient qu’on ne pouvait s’en faire une idée ». (Témoignage d’une octogénaire en 1939)

Cependant, les premiers secours s’organisaient. On se mit en demeure de retirer des décombres les blessés. Une soixantaine, dont quatre devaient succomber peu après : la jeune femme Thirion, épouse d’un tailleur de pierres de Vézelise ; une mère de sept enfants et un homme de Thorey ; une femme d’Eulmont, « dont les poumons étaient remontés dans la gorge ».

Nous n’avons pu savoir si d’autres étaient morts des suites de leurs blessures. Le jeune clerc du notaire, un fils Godot, de Vézelise — dont le père eut une jambe brisée — avait été trouvé dans un piteux état, couché mourant sur la table devant laquelle il écrivait, une poutre pesant sur son dos. Il semble bien qu’il en soit réchappé.

On admira dans cette pénible circonstance le dévouement exemplaire du jeune docteur Borom, du pharmacien Salle, de Mme Joseph Ory, tous de Vézelise, et du curé de Vandeléville.

« Seul pour prodiguer à plus de soixante blessés et mourants, les soins que réclamait leur état, la courageuse activité du docteur ne se ralentissait pas un instant. On l’a vu déchirant sa chemise pour en bander les plaies de ces malheureux. Mais le soir, les forces l’abandonnant, couvert de sueur et de sang, il fut contraint de se faire reconduire chez lui. Sa santé en était altérée, cela ne l’empêcha pas de repartir le lendemain dès 5 heures, pour Etreval. »

En ces temps pacifiques, et dans un Saintois aussi pacifique, où l’on n’avait guère d’accidents à enregistrer, cette pénible catastrophe ne fut pas sans frapper vivement les esprits. C’était un événement sensationnel dont on se souvint longtemps, et que plus d’une fois, sous le manteau de la cheminée, à leurs petits-fils attentifs, les bonnes grand’mères durent conter, par le menu détail, avec des larmes dans la voix.

Sources

Histoires et évènements concernant Vézelise par le Chanoine MARTIN, Curé de Vézelise de 1925 à 1932

Au centre du Saintois, Vézelise ne pouvait, par son importance à la fin du XVIIIe siècle, échapper aux évènements révolutionnaires.

Il est intéressant de situer l’importance de Vézelise en 1789. La ville comprend environ 1900 habitants, répartis en 530 foyers. Tous les corps de métier y sont représentés, comme au temps des ducs et l’importance des foires et marchés n’a pas régressé.

Médecin des pauvres

A la veille des évènements révolutionnaires, une personnalité marque la vie de la cité, Jean-Baptiste Salle. Né le 28 novembre 1759 à Vézelise, Jean-Baptiste Salle est le cadet d’une famille de huit enfants, trois garçons et cinq filles. Son père Jean Salle, marié en 1757 à Barbe Dumont, est alors qualifié de «bourgeois marchand». En 1764, il crée une manufacture de toiles de coton, reprise ensuite par le fils aîné Jean-François Xavier, maire de Vézelise à l’époque révolutionnaire.

La manufacture Salle compte 40 métiers en 1785 et emploie 150 personnes, un développement important qui lui mérite en 1788, le titre de manufacture privilégiée du roi. Mais Jean-Baptiste ne se lance pas dans les affaires comme son frère aîné : il est très attiré par les Sciences et les Mathématiques. Il obtient le titre de docteur en philosophie à Pont-à-Mousson, commence sa médecine à Nancy et la termine à Paris. Durant ses études, Jean-Baptiste Salle est influencé par les idées nouvelles, en particulier celles de Rousseau et de Voltaire.

Dès l’obtention du brevet de médecin en 1786, il revient dans sa ville natale où il exerce sa profession, à Vézelise, en tant que médecin «stipendié», ou médecin des pauvres qu’il soigne gratuitement à l’hôpital. Pour ce service, la municipalité lui verse une «stipende» annuelle de 200 livres, sur le compte de la caisse municipale.

Son premier souci est d’améliorer l’exercice de la médecine et il s’élève contre l’usage ancestral qui réserve au curé le droit de choisir la sage-femme, lors d’une assemblée à l’église. Il expose dans une lettre aux officiers municipaux, la nécessité d’apporter aux sages-femmes une formation et l’urgence d’en nommer une compétente à Vézelise.

«Il y a bien une sage-femme, nommée par M. le curé, suivant la forme prescrite, disent les prêtres, par le rituel ; mais elle n’agrée pas au public ; employer cette femme sera, à coup sûr plus funeste aux mères par son ignorance, que si les mères, dénuées de tout espèce de secours, étaient forcées de confier à la nature le travail entier, car le faux savoir et la sotte suffisance, dans tout ce qui a rapport dans l’art de guérir, sont les fléaux les plus terribles de l’humanité. Pourquoi les curés sont-ils chargés du soin de faire l’élection des matrones ? Cela appartient seul aux médecins et chirurgiens qui s’intéresseront plus à la sage-femme qu’ils auront choisie, que si elle avait été tumultueusement élue dans une assemblée de femmes qui se laissent prévenir, qui ne savent ce qu’elles veulent et qui ignorent plus pleinement encore ce qui leur convient».

En tant que médecin des pauvres et peut-être aussi par anticléricalisme, Jean-Baptiste Salle ne semble guère apprécier la bonne volonté des frères hospitaliers de Saint Jean-de-Dieu : «Dans les cas d’ épidémie, vous appelez dans Vézelise, un frère hospitalier de Saint Jean-de-Dieu, pour y faire la médecine des pauvres. A cet égard, j’ignore les règlements du souverain, mais ce que je sais, c’est que les frères de Saint Jean-de-Dieu n’ont aucune école de médecine et ne sont que les infirmiers de leurs hôpitaux ; ils ne doivent donc pas aller dans les villes, pratiquer un art qu’ils n’ont jamais appris».

«Dans les villes où il y a un médecin stipendié, le rôle du frère de Saint Jean-de-Dieu doit se borner à accompagner le médecin à la visite des malades, de recevoir ses ordonnances, les remplir et de donner aux malades les soins qui leur sont prescrits, par leur règle, etc…». 

Maison natale de Jean-Baptiste Salle, rue Léonard BOURCIER
Maison natale de Jean-Baptiste Salle, rue Léonard BOURCIER Photo de Rémi Bomont

Jean-Baptiste Salle fut d’abord un médecin très attaché à sa vocation. Il fit tous ses efforts et employa tout son dévouement à rendre la médecine plus généreuse et plus efficace. Il était déjà, à la veille de la Révolution, une notabilité marquante.

L'homme politique

Elu député de Vézelise à l’Assemblée du Tiers état du bailliage de Nancy le 12 mars 1789, Jean-Baptiste Salle se voit confier la rédaction des cahiers de doléances de sa ville et du bailliage. Ces cahiers dénoncent sans doute les abus, mais ils sont malgré tout très modérés dans leurs revendications.

Le 20 mars, Jean-Baptiste Salle est choisi comme député électeur et le 6 avril, il se retrouve député à l’Assemblée des Etats généraux, où il représente la campagne. Ses trois autres collègues sont avocats.

En arrivant à Versailles, Jean-Baptiste Salle a le souci matériel de se loger. Le Vézelisien partage son logement avec son collègue et ami, l’avocat Regneault, député de Lunéville. On connaît dès lors les sentiments et la vie quotidienne de Jean-Baptiste Salle, par la correspondance qu’il entretient avec un de ses cousins, domicilié à Nancy.

Il se révèle, par ses interventions à l’Assemblée, comme un député très engagé, qui se trouve rapidement en difficulté avec la municipalité de Nancy, puis celle de Vézelise, à laquelle il reproche certaines mesquineries, à l’égard de son frère Jean-François, alors maire de la ville, «estimable par son dévouement».

Les évènements se précipitent ; après la fuite du roi et son arrestation à Varennes, dans la nuit du 21 au 22 juin 1791 et la dernière séance de l’Assemblée constituante le 30 septembre 1791, Salle revient à Vézelise et reprend sa fonction de médecin. Mais la politique l’a trop marqué, il se refuse à l’abandonner, il est nommé membre du Directoire du département de la Meurthe.

Durant son séjour en Lorraine, il s’élève violemment contre les prêtres réfractaires dans son discours du 31 juillet 1792, au Conseil général du département de la Meurthe. Il affirme ainsi que «de tous ennemis… la classe la plus dangereuse», c’est celle «des prêtres réfractaires» qui «sont en révolte ouverte» et excitent «des scènes d’horreur, sans y paraître eux-mêmes». Il cherche d’ailleurs le moyen de transférer en un autre lieu «tout prêtre non assermenté, perturbateur de la tranquillité publique».

Portrait de Jean-Baptiste Salle, d'après une gravure de l'époque. Dessin Daniel Champeaux
Portrait de Jean-Baptiste Salle, d'après une gravure de l'époque. Dessin Daniel Champeaux

Défenseur du roi

Aux élections de la Convention qui ont lieu à Lunéville en septembre 1792, Jean-Baptiste Salle est élu le premier de la liste et s’est rallié aux Girondins. Il veut persuader la nouvelle assemblée que le roi a été trompé. Il est hostile à la peine de mort contre Louis XVI. Précurseur du référendum, il préconise d’en appeler au peuple pour prononcer la sentence. Il termine ainsi, le 27 décembre 1792, son intervention à la Convention, pour sauver Louis XVI.

«Il n’ est qu’un seul moyen pour éviter de si grands maux, c’est que la Convention après avoir déclaré que Louis est coupable, renvoie au peuple l’application de la peine…ou la nation veut que Louis meure, ou elle ne le veut pas ; si elle le veut, vous tous qui le voulez aussi, votre attente ne sera pas trompée ; si elle ne le veut pas, de quel droit l’enverrez-vous au supplice contre le vœu de la nation ?… Quels que soient les évènements, la Convention restera exempte de toute responsabilité… Il n’y a que deux propositions à proposer, Louis mourra-t-il ? Louis sera-t-il enfermé ?»

Mais Jean-Baptiste Salle se heurte aux Montagnards, farouches partisans de la peine de mort contre Louis XVI, à Marat en particulier pour qui «ce sont les hommes de l’appel au peuple, qui veulent assassiner l’Ami du peuple ».

Fugitif... et condamné à mort.

Malgré tous ces efforts, la Convention condamne le roi à la peine de mort et Louis XVI est exécuté le 21 janvier 1793. Jean-Batiste Salle et d’autres Girondins deviennent vite suspects. Le député de la Meurthe est obligé de s’enfuir début juin 1793, vers Chartres, Evreux, puis Caen, où il retrouve sa femme avec ses trois enfants. Il les emmène et les laisse à Fougères avec le peu d’argent qui lui reste.

Pour subvenir, il emprunte quelques assignats et erre ainsi jusque septembre où il retrouve dans la région de Bordeaux un autre Girondin Guadet. Tous deux sont recueillis le 23 septembre à Saint-Emilion, par la belle sœur de Guadet qui les cache dans une grotte à plusieurs mètres sous terre, durant six semaines. Mais la terreur règne dans la ville où la municipalité a changé. Les hôtes obligent alors les fugitifs à quitter leur cachette, fouillée d’ailleurs quelques heures plus tard. Ils se cachent dans la soupente de la maison du père Guadet, où ils sont découverts lors d’une perquisition.

Les deux Girondins sont transférés à Bordeaux. Le 30 prairial de l’An II (18 juin 1794), Jean-Baptiste Salle et Guadet comparaissent devant le Comité révolutionnaire de Bordeaux. Selon le procès verbal du greffe de la Cour, voici les questions posées à Jean-Baptiste Salle :

— Quelle fut après le décret d’ arrestation, ta retraite à Paris?

— La reconnaissance m’empêche de répondre.

— Le nom de ce chef de bataillon qui, dans le Calvados, te donna un congé militaire pour faciliter ton évasion ?

— Je n’ai rien à répondre.

— Sais-tu dans la Gironde, la retraite de quelques uns de mes collègues ?

— Le citoyen qui m’interroge est trop honnête pour croire que si je les connaissais, je les indiquerais.

— Quels sont les citoyens de Bordeaux, avec qui tu as eu des relations ?

— Je n’ai rien à répondre.

— Le nom du capitaine de la barque qui te transporta ?

— Je l’ignore.

Exécution de Salle et Gaudet, selon une gravure du XIXe siècle. Dessin de Daniel Champeaux
Exécution de Salle et Gaudet, selon une gravure du XIXe siècle. Dessin de Daniel Champeaux

De son côté, Guadet a une attitude identique : «Je me nomme Gaudet, Bourreaux, faîtes votre office. Allez, ma tête à la main, demander votre salaire aux tyrans de ma patrie».

Le lendemain, ils sont traduits devant la Commission militaire présidée par Lacombe qui les condamne à mort et ordonne que la sentence soit exécutée le jour même sur la place de la Révolution Bordeaux (aujourd’hui place Gambetta).

Dans Fragments du passé, Ernest Gegout décrit ainsi la fin des deux Girondins «Guadet et Salle sont étroitement garottés, hissés sur la fatale charrette, ils en descendent avec peine. Leur maintien est digne. Salle porte la tête haute, mais sans forfanterie, son regard est calme. Tous deux gravissent de front les marches de l’ échafaud, s’embrassent tendrement, puis veulent parler à la multitude, mais le roulement des tambours couvre leurs voix puissantes et Guadet, le premier, est violemment poussé sur la bascule. Impassible Salle a vu le corps se contracter et rouler dans le panier. Il s’avance sans hésitation. Mais les aides s’ arrêtent, le lourd couperet en tombant a déplacé l’équilibre de la sinistre machine et le bourreau, qui ne s’en rend pas compte, essaie vainement  de le remonter. Salle, avec un sang-froid impavide, lui explique le non-fonctionnement et dix secondes après, sa tête roule sur l’estrade”.

Avant sa comparution, Jean-Baptiste Salle a écrit à sa femme et à ses trois enfants, une lettre émouvante, dans laquelle il ne cache pas dans ses derniers moments, sa croyance en Dieu : «J’ai trop besoin de penser que l’ordre existe quelque part, pour ne pas croire à l’immortalité de mon âme. Il est grand, juste et bon, ce Dieu au tribunal duquel je vais comparaître».

Après le départ de Jean-Baptiste Salle, son épouse née Charlotte Poinsignon, quitta Caen avec ses enfants et regagna Vézelise. Le 20 octobre 1793, elle se présenta à l’hôtel de ville en présence de trois témoins et sollicita le divorce, en invoquant les raisons suivantes. «Son époux étant proscrit, déclaré traître à la patrie et réputé émigré, qui l’ayant abandonnée elle et ses enfants, elle se trouvait aux termes des motives (sous-entendons des conditions), 2 et 7 de l’ article 4 de la loi du 20 septembre 1792…».

Le 5 germinal de l’An 2 (1794), alors que son mari était en prison et avant que se déroulât le procès de Bordeaux, Charlotte Poinsignon se présenta de nouveau à l’hôtel de ville de Vézelise, avec d’autres témoins, mais cette fois dans le but d’annuler son divorce. Elle déclara «qu’ elle était instruite que Jean-Baptiste Salie son mari, représentant du peuple français, n’ avait point quitté le territoire de la République (ignorait-elle son arrestation ? ), que quoique déclaré traître à la patrie, elle était toujours certaine de son innocence et de son dévouement à la cause de la liberté, qu’ enfin elle avait été forcée par les circonstances et pour se conserver à ses enfants, à demander la dissolution de son mariage, mais qu’ aujourd’hui sa conscience et son attachement à son mari lui dictaient une renonciation formelle à son divorce, pourquoi elle demandait qu’il soit considéré comme nul et non avenu…».

Par cet acte courageux et même téméraire, Charlotte Poinsignon prenait nettement position pour l’action de son mari. Elle l’approuvait même et cette déclaration, qui n’entraîna pas à notre connaissance
de réactions contre l’épouse, est une preuve que la famille Salle continuait à bénéficier d’une certaine estime de la part des autorités municipales.

À la fin du 19ème siècle, Ernest Gegout, vézelisien de naissance, issu d’une longue lignée de maîtres-tanneurs, journaliste parisien, polémiste virulent… et cependant haut fonctionnaire, était propriétaire du “Palais de Justice” à Vézelise, noble maison renaissance, qui avait abrité au cours des temps, outre ses fonctions judiciaires, plusieurs personnages importants, administrateurs du comté de Vaudémont, dont Vézelise était capitale.

Bureau du maire - ancien Palais de Justice de Vézelise
Bureau du maire - ancien Palais de Justice de Vézelise

Ernest Gegout, passionné d’histoire locale, chargea l’un de ses amis, artiste peintre, d’orner la grande salle de l’ancien prétoire de Justice, en l’encadrant d’immenses toiles, représentant la visite à Vézelise de René Il – Ville où le prince avait été précédemment reconnu comme Duc de Lorraine par les “Etats” réunis au château local. L’artiste contacté : Gaston Save, était aussi un éminent archéologue, auteur de nombreux articles et communications dans les bulletins artistiques et philomathiques lorrains. Il était donc, outre la possession de son art de peindre, parfaitement apte à juger de la présentation historique de son œuvre.

Duc Antoine jeune. Extrait de la fresque de l'ancien Palais de Justice de Vézelise
Duc Antoine jeune. Extrait de la fresque du Palais de Justice de Vézelise.

Le cortège triomphal débute par une troupe de cavaliers-musiciens, tympanistes et tubicennes en action, troupe suivie par le héraut d’armes présentant la bannière révérée de l’Annonciade “qui mit Bourgogne en débandade”. Puis viennent les quatre “Grands chevaux de Lorraine” : Lenoncourt-Haraucourt-Chastelet et Lignéville, sur leurs montures ce guerre et présentant leurs pennons.
La famille ducale se compose de :
René II en armure, chevauchant un destrier richement caparaçonné aux armes de Lorraine.
Le Duc est entouré de hallebardiers.
La Duchesse Philippe de Gueldre, montant en amazone !a haquenée blanche. Elle est accompagnée d’une jeune fille, sa suivante.
Viennent ensuite deux des fils du couple ducal : Jean, très jeune évêque, représenté comme un enfant Pune dizaine d’années, monté sur une mule, coiffé ce la et brancissant la crosse, symboles de son titre épis-: cal.
Antoine, aîné et futur héritier du Duché. Pour le moment marquis de Pont et comte de Vaudémont.
Un hallebardier richement vêtu ferme la marche en montrant du doigt une maison qui représente, très approximativement, le “Palais de Justice” de Vézelise. Ensuite un groupe de vassaux, encadrant le grand Maréchal-Sénéchal de Lorraine Jean de Salm, tous cavaliers et munis de leurs panonceaux d’armes. Enfin, venant respectueusement au devant de cet arroi : Le Seigneur de Tavagny, capitaine de la ville, en présente les armes parlantes : Trois moutoilles et la devise : Moult valent et moult avalent.

Entrée de Renée II à Vézelise, fresque de l'ancien Palais de Justice
Entrée de Renée II à Vézelise, fresque de l'ancien Palais de Justice

Les quatre principaux personnages du panneau central sont accompagnés de leurs blasons : Pour René II, l’écu de Lorraine – qui n’est pas encore complété par les deux lions de sable et d’or – entouré des Prény… Prény… de ralliement lorrain.
Sous l’écu la devise personnelle de René : “Une pour toutes à jamais” (il oubliait Jeanne d’Harcourt !). Pour Philippe de Gueldre, l’écusson losangé mi Lorraine-mi Gueldre et Juliers, ces derniers symboles constituant ses apports, selon indications du phylactère.
Pour Jean l’enfant évêque : Ses armes futures de Cardinal ce Lorraine, avec texte latin, célébrant à l’avance sa gestion religieuse…
Pour Antoine : Les armes de Vaudémont, dont il avait le titre de comte, avant sa future accession au trône de Lorraine.
L’ensemble, classé M.H., cont nous présentons l’un des panneaux en couverture, est très décoratif, haut en couleurs et fut certainement spectaculaire lors de sa réalisation. Il est actuellement en mauvais état : décloué, découpé, terni et sali.

Sources

La Revue Lorraine, revue n°127 datant de Décembre 1995

En 1908, lors de l’érection du monument à la mémoire des enfants du canton, morts pour la patrie, le commandant Mangin, président du comité du Souvenir Français de Vézelise, obtient la cession de 4 canons.

Les canons actuels de Vézelise
Les canons actuels de Vézelise

Le monument est inauguré le 31 mai 1908. Les 4 canons de 90 mm « De Bange »,  modèle 1877 orneront le monument jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Durant l’occupation, les Allemands retirent ces pièces d’artillerie pour les fondre. Ce n’est qu’en 1950, à l’initiative du maire, Robert Géant, qu’ils seront remplacés par 4 canons de 47 mm antichar modèle 1937. Excellent matériel, le canon antichar de 47mm modèle 37, est une arme puissante capable de détruire tous les chars allemands de 1940. Mille deux cents canons ont toutefois été livrés avant l’armistice, ils représentaient une avance considérable par rapport au matériel allemand.

Le 47mm français pouvait être considéré en 1939 comme le meilleur d’Europe.

Sources

Espace de Mémoire Lorraine 1939-1945
Site Web : http://espacedememoire.fr/

Si durant la première guerre mondiale, Vézelise ne subit aucun bombardement, il n’en fut pas de même en juin 1940. Les nombreux réfugiés ainsi que la forte concentration en troupes firent de la capitale du Saintois une cible privilégiée pour l’aviation ennemie. 

Le samedi 15 juin, à 6h30 du matin, un premier projectile tomba près des Halles. Une automobile militaire qui se trouvait là fut projetée et resta dressée sur ses roues arrières. Son chauffeur, Marcel Requillart, 31 ans, de la 356e Cie d’Autos, fut tué sur le coup.

Automobile militaire retournée par le bombardement du 15 juin 1940. Son chauffeur est mort sur le coup
Automobile militaire retournée par le bombardement du 15 juin 1940. Son chauffeur est mort sur le coup

D’autres bombes tombèrent également sur l’agglomération et dans les terrains bordant les routes qui suivaient les troupes en retraite.

Dès ce moment, une partie de la population abandonnant les maisons où elle ne se sentait pas en sécurité se dispersa dans les champs et attendit les évènements.

Vézelise fut, pendant plusieurs jours encore, survolée par de nombreuses escadrilles qui harcelaient les troupes en retraite pour briser les nids de résistance.

Mais le bombardement qui marqua profondément les habitants de Vézelise encore présents dans la ville se produisit le 18 juin 1940, à 14h30 (quelques instants après l’occupation de Nancy). Alors que les convois continuaient à défiler dans les rues et qu’on entendait au loin le bruit du combat, des bombes s’abattirent sur la petite ville.

“Il était 14h30, je me rendais chez ma cousine Piezel, dans la montée des Capucins. Il n’y avait personne, la porte était fermée; heureusement, car quelques secondes plus tard, j’aurais fait comme la tortue qui se trouvait dans le jardin, j’aurais sauté en l’air; je n’ai eu que le temps de me réfugier dans une cave voûtée qui se trouvait à proximité.”  Témoignage de Mme Marie Perrin, née Duval, 14 ans en juin 1940

Le bombardement se prolongea 30 minutes durant, un spectacle terrifiant; des corps déchiquetés, parfois carbonisés gisaient dans les rues. Dix immeubles entièrement détruits, vingt autres plus ou moins endommagés. Un immeuble de la brasserie, notamment, fut atteint et M. Louis MOREAU, maire et conseiller général, qui, en ces moments tragiques, était resté fermement à son poste, reçut des éclats qui le blessèrent à la tête et aux mains.

Immeuble de la brasserie suite au bombardement de Juin 1940
Immeuble de la brasserie suite au bombardement de Juin 1940, emplacement de la future rue Marcel Astorg

“J’étais monté voir les soldats qui cantonnaient près de la route d’Hammeville; je n’ai eu que le temps de m’allonger contre les militaires, cela sifflait de partout avec des détonations assourdissantes; quelle trouille, mais aussi quelle dérouille par mon père, quand je suis rentré !”  Témoignage de Jean PELLI, né en 1928

La plupart des victimes furent des militaires (19 soldats identifiés, 12 inconnus). À ceux-ci s’ajoutèrent 7 réfugiés et 6 Vézelisiens : Monique BARTHELEMY, 11 ans, Jean FURGAUX, 11 ans, Pierre REMY, 17 ans, Joseph-Edmond GERARD, 72 ans et Théophile JACQUOT,  54 ans. Un autre enfant, Jean-Claude ROBINOT, 5 ans, décéda de ses blessures le 25 juin.

L’inhumation des victimes eut lieu provisoirement dans le pré de Saulcy.

Dans la nuit, quelques obus égarés tombèrent encore sur la petite ville, sans causer de victime, puis le calme se fit.

L’occupation allemande débuta deux jours plus tard, le 20 juin 1940 par la manœuvre d’encerclement de l’armée de Lorraine. Elle se prolongea 4 années, jusqu’à sa libération, le 2 septembre 1944, par l’armée Patton; selon certains témoignages, le général américain aurait séjourné à Vézelise durant deux ou trois jours.

Bulletin paroissial de Vézelise de Septembre 1940

“Le mois de juin 1940 nous laissera à tous d’impressionnants et durables souvenirs; l’intense bombardement du mardi 18 qui fit les victimes que l’on sait; l’entrée des premières troupes allemandes le jeudi 20; par surcroît, les convois sans répit – de noir et de jour – des malheureux réfugiés de la Meuse et d’ailleurs qui s’en allaient au hasard devant eux avec, entre-temps, l’incendie après pillage, de deux grosses épiceries de la place, dû à des mains mystérieuses?.. de tout cela, on se souviendra longtemps”

“Nous nous inclinons profondément devant nos chers paroissiens tombés ici pour la France. Nous ne pouvons pas penser sans attendrissement à ces jeunes enfants, espoir de l’avenir, et qui trouvèrent en ces jours historiques une si triste destinée ! Que Dieu adoucisse la douleur de leur famille éprouvée”

“Après coup, on se rend compte et avec le recul du temps, on se rendra compte davantage des sérieux dangers qu’a couru notre cité. Quand on pense que la suprême bataille devait se livrer autour de Sion, et que de ce fait, elle aurait certainement entraîné de gros risques pour les habitants de la région et leurs maisons, il y a lieu de se féliciter de s’en être tiré à si bon compte. Notre-Dame de Sion nous a visiblement protégé.”

“Notre vieille église a eut bien chaud, encadrée qu’elle fut par un chapelet de bombes. La déflagration souffla les vitraux de la nef, dont la valeur au point de vue artistique laissait à désirer… mais tels quels, ils servaient de points de comparaison; leur aspect faisait ressortir la supériorité incontestable des verrières du chœur.”

Sources

Histoire méconnues du canton de Vézelise, de Bernard PERRIN

Site internet de l’association Espace de mémoire 

Corpuscule de bulletins paroissiaux